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LES BELLES-DE-NUIT.

leurs habits, semblaient entre eux sur le pied d’une égalité parfaite. À bien les considérer même, on aurait pu reconnaître, chez celui qui portait un costume bourgeois, une sorte de déférence combattue. Ils étaient jeunes tous les deux et assez beaux garçons. Le bourgeois, qui avait nom Blaise, était un gaillard bien découplé, muni de larges épaules, et montrant, quand il souriait, deux rangées de dents blanches comme l’ivoire. Il avait une grosse figure rougeaude et des cheveux blonds crépus. Le caractère de sa physionomie était une jovialité un peu brutale, qui se voilait, en ce moment, sous un nuage de mauvaise humeur non équivoque.

Les bons amis de Blaise ignoraient, à ce qu’il paraît, son nom de famille, car, pour le distinguer du commun des Blaises, on l’avait surnommé l’Endormeur.

L’autre pouvait compter vingt-cinq ans tout au plus, ce qui ne l’empêchait pas d’avoir dans son passé cinq ou six romans d’un certain intérêt. Ceux qui le connaissaient intimement lui savaient plus d’un nom ; en ce moment il s’appelait Robert, dit l’Américain. Il était un peu plus petit que son compagnon, et ses membres n’avaient pas la même apparence de vigueur ; mais sa taille était admirablement prise, et la souplesse de ses mouvements n’excluait point la force.