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LES BELLES-DE-NUIT.

comme il l’avait dit ; il s’y cramponnait obstinément. Cette vengeance inattendue devait être terrible…

Les trois jeunes gens tournaient vers lui leurs regards suppliants. Il ne voulait point les voir.

Jean de Penhoël avait piqué son épée en terre.

Ses yeux étaient fixés sur le nabab, et une étrange hésitation semblait envahir son visage.

— Je ne sais pas si ma pauvre tête se perd…, murmura-t-il ; Vincent, toi qui as de bons yeux, regarde donc… mais tu étais un tout petit enfant lorsqu’il nous quitta… Mon Dieu ! mon Dieu ! est-ce que je rêve ?

Sa voix tremblait. Il fit un pas en avant.

Le nabab semblait ne point entendre.

— Laissez-moi vous regarder, monsieur… reprit le vieillard dont l’émotion allait croissant ; vous me tourniez le dos hier quand je vous ai provoqué… et mes yeux sont trop faibles désormais pour distinguer comme il faut le visage d’un homme à la longueur de deux épées…

Il était tout près de Montalt, qui baissait les yeux en fronçant le sourcil.

— Oh !… fit le vieillard d’une voix brisée, il y a vingt ans de cela, et je me trompe peut-être !… Regardez-moi, monsieur… Ne me reconnaissez-vous pas ?