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LE MÉDECIN BLEU.

— Ainsi vous refusez de recevoir Marie Brand ? prononça lentement de Vauduy.

— Je refuse.

Vauduy tira le cordon d’une sonnette, et deux paysans, armés jusqu’aux dents, parurent sur le seuil d’une porte latérale.

Mais, au même instant, la porte d’entrée s’ouvrit avec fracas, et Marie Brand s’élança dans le salon. Une vive rougeur colorait sa joue ; son œil brillait d’un éclat extraordinaire, et ses sourcils froncés donnaient à sa physionomie une expression de sauvage et impérieuse rudesse.

À son aspect, M. de Vauduy, Jean Brand, et le curé lui-même se découvrirent respectueusement. Elle ne répondit point à leur salut.

— Que signifie cela, messieurs ? dit-elle, en entrant, d’une voix brève et courroucée ; depuis quand la fille de mon père a-t-elle besoin qu’on sollicite pour elle un asile ?

— Not’ demoiselle… murmura humblement Jean Brand.

— Paix ! Je vous avais fait connaître mes volontés ; vous saviez qu’il me plaisait de suivre l’armée royaliste, et de combattre dans les rangs des fidèles soutiens du trône et de l’autel. Est-ce un complot que vous tramiez contre moi, messieurs ?

— Mademoiselle, dit Vauduy, si c’est un crime d’avoir voulu mettre à l’abri votre précieuse personne…

— Est-ce donc la fille d’un roi ? se demanda Saulnier.

Et en effet, à voir le geste impérieux et la pose pleine de majesté de cette enfant de treize ans, devant laquelle s’inclinaient ces trois hommes, cette question était permise. Si Marie n’était pas de race royale, du moins devait-elle être