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MADAME GIL BLAS

Il venait, il me prenait sur ses genoux, il me dévorait de baisers.

La Noué pouvait me battre avec sa heude. J’avais mon parrain qui m’aimait.

Pendant que j’écris cela, j’ai les larmes aux yeux. Gustave ! pauvre moitié de ma vie ! mon premier, mon dernier amour !…

II

Ce que c’était que mon parrain. — Quelques mots sur ma naissance. — La loge de la Noué. — Le bonhomme.

Gustave était le fils du bonhomme Simon Lodin et le frère cadet de la Noué. La différence d’âge entre eux était grande. Gustave n’avait que cinq ans de plus que moi.

C’était un beau petit gars de dix à onze ans, grand et bien découplé : tête blonde, œil hardi et rieur. Si je lui avais dit en ce temps-là que sa sœur me battait, il l’aurait assommée à coups de pierre.

Un dimanche au matin, Gustave avait trouvé devant le pauvre seuil de la loge un paquet de linge. C’était moi. Scholastique n’était pas encore la maîtresse ; le bonhomme gardait l’usage de ses membres. Scholastique dit :

— Mettez-moi ça sur le pont. Ceux qui passeront s’en chargeront s’ils veulent.

Mais Gustave me tenait déjà dans ses bras. Il ne voulut pas me lâcher. Le père Simon