Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/194

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fixée, et organisèrent la réunion en nommant pour président un vieillard fort religieux, qui, si je me le rappelle bien, commença par une prière, et en suite s’adressa aux auditeurs dans les termes suivants : « Mes amis, puisque nous tenons le traître, je suis d’avis que les jeunes gens s’emparent de lui, l’entraînent au dehors et le tuent ! » En un instant, un grand nombre d’entre eux s’élancèrent vers lui ; mais quelques-uns plus timides se jetèrent entre les assaillants et le traître, qui en profita pour échapper à leur vengeance ; mais on ne l’a jamais revu à New-Bedford depuis cette époque-là. On n’a plus entendu de menaces semblables ; s’il y en avait, je ne doute pas qu’elles ne causassent la mort de celui qui les aurait proférées.

Le troisième jour après mon arrivée, je trouvai du travail ; il s’agissait de charger un bâtiment d’huile. C’était pour moi une besogne nouvelle, sale et pénible ; mais je m’y mis avec ardeur et avec joie. J’étais désormais mon propre maître ! Je n’appartenais qu’à moi-même ! Quel moment de bonheur ! Pour comprendre mes transports, il faut avoir été esclave, et avoir cessé de l’être ! C’était le premier travail dont j’allais recueillir la récompense tout entière. Il n’y avait pas de maître avide et injuste auprès de moi pour me voler mon ar-