Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/54

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imperturbable. Sa barbarie féroce ne pouvait se comparer qu’à l’indifférence complète qu’il manifestait tout en commettant les actes les plus odieux et les plus inhumains sur les esclaves placés sous sa surveillance. Une fois, M. Gore voulut fouetter un esclave du nom de Demby. Il ne lui avait encore donné que quelques coups, lorsque Demby, pour échapper aux souffrances, courut vers une anse non loin de cet endroit, se plongea dans l’eau jusqu’aux épaules, et refusa d’en sortir. M. Gore lui dit qu’il allait l’appeler trois fois, et que, s’il n’en sortait pas, il le tuerait d’un coup de fusil. Le premier appel se fait entendre, Demby ne répond pas et reste immobile. Le second et le troisième ont le même résultat. Enfin, M. Gore, sans aucune délibération avec qui que ce soit, sans donner à Demby un avertissement de plus, lève son mousquet, met en joue sa malheureuse victime, vise avec une adresse mortelle ; le coup part, et en un instant le pauvre Demby n’est plus ; son corps mutilé s’enfonce et disparaît, et il ne reste que du sang et des débris de cervelle à la surface de l’eau, pour marquer l’endroit où il était tout à l’heure.

Un frémissement d’horreur glaça tous les cœurs dans la plantation, excepté celui de M. Gore lui-même. Il semblait seul indifférent et calme. Le co-