Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/78

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près du chantier de Durgin et Bailey. J’avais l’habitude de m’entretenir avec eux au sujet de l’esclavage. Je leur disais quelquefois que je voudrais bien avoir la perspective d’être aussi libre qu’eux, lorsqu’ils deviendraient hommes. « Ah ! m’écriai-je, vous, vous serez libres dès que vous aurez vingt-un ans, mais moi, je suis esclave pour la vie ! N’ai-je pas le droit d’être libre, aussi bien que vous ? » Ces paroles-là les attristaient ; alors ils exprimaient pour moi la plus vive sympathie, et me consolaient avec l’espérance qu’il arriverait quelque événement pour me rendre la liberté.

J’avais à cette époque à peu près douze ans, et la pensée d’être esclave pour la vie, commença à être pour mon cœur un poids douloureux. Ce fut alors qu’un livre, intitulé l’Orateur colombien, me tomba sous la main. Je le lisais chaque fois qu’une occasion favorable s’en présentait. Parmi beaucoup d’autres matières intéressantes, j’y trouvai un dialogue entre un maître et son esclave. On y représentait l’esclave comme s’étant sauvé trois fois de chez son maître. Ce dialogue rapportait la conversation du maître et de l’esclave, après la troisième reprise de ce dernier. Il contenait l’exposé de tous les arguments que le maître faisait valoir en faveur de l’esclavage, et de toutes les raisons dont l’esclave se