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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

Jules. — Mettons dix chenilles par oisillon et dix petits dans le nid. Cela ferait cent chenilles dans la journée. C’est beaucoup.

Paul. — Beaucoup ! Ah ! que vous êtes loin de compte ! En moyenne, le troglodyte apporte à manger trente-six fois par heure à ses petits. Il leur sert un mélange d’insectes, de larves et d’œufs. Au bout de la journée, le nombre d’insectes détruits, sous une forme ou sous l’autre, s’élève à cent cinquante-six mille. Nous voilà bien loin de votre maigre calcul, mon pauvre Jules.

Jules. — Les chenilles doivent être bien petites, autrement la nichée du troglodyte étoufferait d’indigestion.

Paul. — Sans doute, elles sont très petites, et puis beaucoup sont encore dans l’œuf. Le résultat pour nous n’en est pas moins d’une haute importance ; autant d’œufs avalés, autant de ravageurs de moins pour l’avenir.

Louis. — En admettant que le troglodyte fît exclusivement choix de la vermine qui s’attaque aux poires, ce serait donc cent cinquante-six mille poires que le petit oiseau conserverait à l’homme dans un jour ?

Paul. — Évidemment.

Louis. — C’est à ne pas y croire.

Paul. — Je conviens que le résultat est prodigieux, relativement aux moyens mis en œuvre. Un tout petit oiseau, auquel nul ne prend garde, s’en va becquetant par-ci par-là. Tout compte fait, au bout de la journée, il se trouve que l’échenilleur a détruit dans l’œuf, sous la forme de nymphe, ou bien à l’état parfait, des milliers d’insectes qui, laissés en vie, auraient prélevé sur nos récoltes d’énormes corbeilles de fruits, des boisseaux de grains par centaines. S’il fallait chiffrer la valeur des biens que sauvegardent les oiseaux mangeurs de vermine, ce serait par sommes fabuleuses. Paix, mes enfants, paix et protection à ces vaillants qui empêchent la famine d’entrer dans nos maisons.

Puisque nous y sommes, parlons d’un autre petit Poucet des oiseaux, échenilleur acharné comme le troglodyte. Il se nomme le roitelet, c’est-à-dire petit roi, à cause de la couronne d’un jaune d’or et bordée de noir qui lui ceint la tête. C’est le plus petit de nos oiseaux. Il est olivâtre dessus, blanc-jaunâtre dessous. Les belles plumes de sa couronne peuvent se dresser en forme de huppe.

Le roitelet niche dans les pays froids de l’Europe, surtout