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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

leuvre se plaît dans les lieux humides ; elle fréquente les eaux dormantes, où elle nage habilement pour saisir de petits poissons, des insectes aquatiques, des têtards. Pour ce motif, elle a les noms de serpent d’eau et de serpent nageur.

Elle dépose communément ses œufs dans les couches de fumier, favorables à l’éclosion par leur chaleur naturelle. Ces œufs sont en ovale allongé, à coque flasque semblable à du parchemin mouillé. Leur grosseur est celle des œufs de pic. Ils sont agglutinés en chapelet par une humeur visqueuse. En remuant les tas de fumier, les personnes de la campagne ont fréquemment occasion de trouver sous leurs fourches ces œufs à coque molle, dont l’origine leur est inconnue et d’où, à leur grande stupéfaction, il sort de jeunes serpents. Elles prétendent que ce sont des œufs de coq, œufs hors nature, entachés de sorcellerie, procréant des couleuvres au lieu de poulets. Difficilement on leur ôterait de la tête cette folle idée. Quant à vous, mes enfants, s’il vous arrive jamais d’entendre parler d’œufs pondus par les coqs dans les couches de fumier et produisant des serpents, rappelez-vous que ce sont tout simplement des œufs de la couleuvre à collier.

Méfiez-vous encore d’un autre conte qui circule dans nos villages. La même couleuvre, à ce que l’on dit, partagerait avec quelques autres serpents l’inclination à s’introduire par la bouche dans le corps des gens dormant sur l’herbe fraîche. Pour débarrasser le patient de cet hôte incommode, il faudrait attirer le serpent dehors par l’odeur du lait chaud. Ce sont là pures niaiseries ; il ne peut prendre fantaisie à aucun animal d’aller se réfugier dans notre estomac, où il serait digéré, réduit en bouillie, comme l’est une simple bouchée de pain.

La couleuvre commune, ou couleuvre verte et jaune, habite de préférence les lieux boisés et retirés. Elle a le dos d’une couleur verdâtre très foncée, avec un grand nombre de raies composées de taches jaunâtres de diverses figures, les unes allongées, les autres en losange et plus grandes vers les côtés que sur le milieu du dos. Le ventre est jaunâtre. Chacune des grandes plaques qui le couvrent est bordée d’une très petite ligne noire et ornée d’un point noir à l’un et l’autre bout.

La couleuvre lisse ressemble beaucoup à la couleuvre à collier, dont elle diffère surtout par les écailles, qui sont