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LES ANIMAUX UTILES À L’AGRICULTURE

insecte qui passe. C’est le protecteur des espaliers. « Lorsque, dans un beau jour de printemps, le soleil éclaire vivement un gazon en pente ou une muraille qui augmente la chaleur en la réfléchissant, on le voit s’étendre sur ce mur ou sur l’herbe nouvelle avec une espèce de volupté. Il se pénètre avec délices de cette chaleur bienfaisante ; il marque son plaisir par de molles ondulations de sa queue déliée ; il fait briller ses yeux vifs et animés ; il se précipite comme un trait pour saisir une petite proie, ou pour trouver un abri plus commode. Bien loin de s’enfuir à l’approche de l’homme, il paraît le regarder avec complaisance ; mais au moindre bruit qui l’effraye, à la chute seule d’une feuille, il se roule, tombe et demeure pendant quelques instants comme étourdi par sa chute ; ou bien il s’élance, disparaît, se trouble, revient, se cache de nouveau, reparaît encore, décrit en un instant plusieurs circuits tortueux que l’œil a de la peine à suivre, se replie plusieurs fois sur lui-même et se retire enfin dans quelque asile jusqu’à ce que sa crainte soit dissipée. Utile autant que gracieux, le petit lézard gris se nourrit de mouches, de grillons, de sauterelles, de vers de terre, de presque tous les insectes qui détruisent nos fruits et nos grains ; aussi serait-il avantageux que l’espèce en fût plus multipliée. À mesure que le nombre des lézards gris s’accroîtrait, nous verrions diminuer les ennemis de nos jardins.

Le lézard vert, si fréquent partout, dans les haies, sur la lisière des bois, dans les fourrés herbus, atteint trois décimètres de longueur. La peau du dos est une élégante broderie de perles vertes, rehaussée de points noirs et de points jaunes. Le lézard court avec agilité, il s’élance au milieu des broussailles et des feuilles sèches avec une soudaineté qui surprend toujours et cause un premier mouvement d’effroi. Il se jette au museau des chiens qui l’attaquent et les mord avec tant d’obstination, qu’il se laisse emporter et même tuer plutôt que de desserrer les dents. Sa morsure d’ailleurs n’a rien de venimeux ; elle meurtrit plus ou moins les chairs, sans introduire dans la petite plaie aucune espèce de venin. En captivité, il devient très familier, très doux, et se laisse manier avec plaisir. Sa nourriture consiste surtout en insectes.

La région des oliviers du midi de la France possède un autre lézard, plus gros, plus robuste, plus lourd et plus trapu que le vulgaire lézard vert. Les Provençaux l’appellent rassade ;