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des paniers. Le matou à lui seul occupe le sien, sinon la paix serait compromise. Le voyage se fait en voiture, en compagnie de ma famille. Rien de saillant jusqu’à l’arrivée. Extraites de leurs paniers, les chattes visitent le nouveau domicile, elles explorent une à une les pièces ; de leur nez rose, elles reconnaissent les meubles : ce sont bien leurs chaises, leurs tables, leurs fauteuils, mais les lieux ne sont pas les mêmes. Il y a de petits miaulements étonnés, des regards interrogateurs. Quelques caresses et un peu de pâtée calment toute appréhension ; et du jour au lendemain, les chattes sont acclimatées.

Avec le matou, c’est une autre affaire. On le loge dans les greniers, où il trouvera ampleur d’espace pour ses ébats ; on lui tient compagnie pour adoucir les ennuis de la captivité ; on lui monte double part d’assiettes à lécher ; de temps en temps, on le met en rapport avec quelques-uns des siens pour lui apprendre qu’il n’est pas seul dans la maison ; on a pour lui mille petits soins dans l’espoir de lui faire oublier Orange. Il paraît l’oublier en effet : le voilà doux sous la main qui le flatte, il accourt à l’appel, il ronronne, il fait le beau. C’est bien : une semaine de réclusion et de doux traitements ont banni toute idée de retour. Donnons-lui la liberté. Il descend à la cuisine, il stationne comme les autres autour de la table, il sort dans le jardin, sous la surveillance d’Aglaé qui ne le perd pas des yeux, il visite les alentours de l’air le plus innocent. Il rentre. Victoire ! le chat ne s’en ira pas.

Le lendemain : « Minet ! Minet !… » pas de Minet. On cherche, on appelle. Rien. — Ah ! le tartuffe, le tartuffe ! Comme il nous a trompés ! Il est parti, il est à