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percevant en arrêt au premier étage de sa demeure, qui est le coude dont j’ai parlé, je crus, pour m’en rendre maître, devoir l’attaquer de vive force et la poursuivre à outrance ; je passai des heures entières à ouvrir la tranchée avec un couteau de plus d’un pied sur deux pouces de largeur, sans rencontrer la Tarentule. Je recommençai cette opération dans d’autres clapiers et toujours avec aussi peu de succès ; il m’eût fallu une pioche pour atteindre mon but, mais j’étais trop éloigné de toute habitation. Je fus obligé de changer mon plan d’attaque et je recourus à la ruse. La nécessité est, dit-on, la mère de l’industrie.

« J’eus l’idée, pour simuler un appât, de prendre un chaume de graminée surmonté d’un épillet, et de frotter, d’agiter doucement celui-ci à l’orifice du clapier. Je ne tardai pas à m’apercevoir que l’attention et les désirs de la Lycose étaient éveillés. Séduite par cette amorce, elle s’avançait à pas mesurés vers l’épillet. Je retirais à propos celui-ci un peu en dehors du trou pour ne pas laisser à l’animal le temps de la réflexion ; et l’Aranéide s’élançait souvent d’un seul trait hors de sa demeure, dont je m’empressais de fermer l’entrée. Alors la Tarentule, déconcertée de sa liberté, était fort gauche à éluder mes poursuites et je l’obligeais à entrer dans un cornet de papier que je fermais aussitôt.

« Quelquefois, se doutant du piège, ou moins pressée peut-être par la faim, elle se tenait sur la réserve, immobile, à une petite distance de la porte qu’elle ne jugeait pas à propos de franchir. Sa patience lassait la mienne. Dans ce cas, voici la tactique que j’employais. Après avoir bien reconnu la direction du boyau et la