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est désormais sans difficulté. Hors de sa demeure, la Lycose est peureuse, comme effarée, à peine capable de fuir. La pousser dans un cornet avec un chaume est l’affaire d’un instant.

Il faut quelque patience pour amener jusqu’à l’orifice du terrier la Tarentule qui a mordu sur l’insidieux épillet. La méthode suivante est plus prompte. Je me procure une provision de Bourdons vivants. J’en mets un dans un petit flacon à goulot assez large pour enclore l’orifice du terrier, et je renverse sur cet orifice l’appareil ainsi amorcé. Le vigoureux hyménoptère d’abord vole et bruit dans sa prison de verre ; puis, apercevant un terrier semblable à celui de sa famille, il s’y engage sans grande hésitation. Mal lui en prend : tandis qu’il descend, l’Araignée monte ; la rencontre a lieu dans le couloir vertical. Quelques instants l’oreille perçoit une sorte de chant de mort. C’est le bruissement du Bourdon qui proteste contre l’accueil qui lui est fait. Puis, brusque silence. Le flacon est donc enlevé, et une pince à longues branches est plongée dans le puits. Je retire le Bourdon, mais immobile, mort, la trompe pendante. Quelque terrible drame vient de se passer. L’Araignée suit, ne voulant pas lâcher un si riche butin. Gibier et chasseur sont amenés à l’orifice. Méfiante, l’Aranéide parfois rentre ; mais il suffit de laisser le Bourdon sur le seuil de la porte, ou même à quelques pouces plus loin, pour la voir reparaître, sortir de sa forteresse et venir, audacieuse, reprendre sa proie. C’est le moment : la demeure est fermée du doigt ou d’un caillou, et, comme le dit Baglivi, captatur tamen ista a rustico insidiatore. J’ajouterai : adjuvante Bombo.