Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, deuxième série, 1894.pdf/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ponte, ai-je dit, dure trente-six heures, et mes fréquentes visites à la femelle, livrée à cette opération dans la cavité du bouchon, m’ont convaincu qu’il n’y a pas d’interruption notable dans le dépôt successif des œufs. Or, moins d’une minute s’écoule entre l’arrivée d’un œuf et celle du suivant, le nombre de ces œufs ne saurait donc être inférieur au nombre des minutes contenues dans trente-six heures ou à 2160. Mais peu importe ce nombre exact, il suffit de constater qu’il est fort grand, ce qui suppose, pour les jeunes larves qui en proviendront, de bien nombreuses chances de destruction, puisqu’une telle prodigalité de germes est nécessaire au maintien de l’espèce dans les proportions voulues.

Averti par ces observations, renseigné sur la forme, le nombre et l’arrangement des œufs, j’ai recherché dans les galeries des Anthophores ceux que les Sitaris y avaient déposés, et je les ai invariablement trouvés amoncelés en tas dans l’intérieur des galeries, à un pouce ou deux de leur orifice, toujours ouvert à l’extérieur. Ainsi, contrairement à ce qu’on avait quelque droit de supposer, les œufs ne sont pas pondus dans les cellules de l’abeille pionnière ; ils sont simplement déposés, en seul tas, dans le vestibule de son logis. Bien plus, la mère n’exécute pour eux aucun travail protecteur, elle ne prend aucun soin pour les abriter contre la rigueur de la mauvaise saison ; elle n’essaie pas même, en bouchant tant bien que mal le vestibule où elle les a pondus à une faible profondeur, de les préserver des mille ennemis qui les menacent ; car, tant que les froids de l’hiver ne sont pas venus, dans ces galeries ouvertes circulent des Araignées, des