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déjà que la jeune larve de Sitaris n’est pas appelée à se mouvoir sur une surface ordinaire. Le lieu, quel qu’il soit, où cette larve doit vivre plus tard, l’expose à de bien nombreuses chances de chutes périlleuses, puisque, pour les prévenir, elle est non seulement armée d’ongles robustes, très mobiles, et d’un croissant acéré, espèce de soc capable de mordre sur le corps le mieux poli, mais encore elle est munie d’un liquide visqueux, assez tenace pour l’engluer et la maintenir en place sans le secours des autres appareils. En vain je me suis mis l’esprit à la torture pour soupçonner quel pouvait être le corps si mobile, si vacillant, si dangereux, que doivent habiter les jeunes Sitaris, rien n’a pu m’expliquer la nécessité de l’organisation que je viens de décrire. Convaincu d’avance, par l’étude attentive de cette organisation, que je serais témoin de singulières mœurs, j’ai attendu, avec une vive impatience, le retour de la belle saison, ne doutant pas qu’à l’aide d’une observation persévérante le mystère ne me fût dévoilé au printemps suivant. Ce printemps si désiré est enfin venu ; j’ai mis en œuvre tout ce que je peux posséder de patience, d’imagination, de clairvoyance ; mais, à ma grande honte, à mon regret plus grand encore, le secret m’a échappé. Oh ! qu’ils sont pénibles ces tourments de l’indécision lorsqu’il faut remettre à l’année suivante une étude qui n’a pas abouti !

Mes observations faites dans le courant du printemps 1856, quoique purement négatives, ont cependant leur intérêt, parce qu’elles démontrent fausses quelques suppositions qu’amène naturellement le parasitisme incontestable des Sitaris. J’en dirai donc quelques mots. Vers la fin d’avril, les jeunes larves, jusque-là immo-