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l’une ou l’autre des formes multiples qu’il revêt successivement. Et cependant, dans le fourré soyeux du thorax de l’hyménoptère, sont établies plusieurs jeunes larves, toutes surveillant avec ardeur l’instant propice pour pénétrer dans le domicile où elles doivent poursuivre leur développement. Comment se fait-il donc que ces larves, aiguillonnées par un appétit comme doivent en faire supposer sept à huit mois d’abstinence absolue, au lieu de se ruer toutes ensemble dans la première cellule à leur portée, pénètrent, au contraire, une à une et avec un ordre parfait, dans les diverses cellules qu’approvisionne l’hyménoptère ? Il doit y avoir encore là quelque manœuvre indépendante des Sitaris.

Pour satisfaire à ces deux conditions indispensables, l’arrivée de la larve sur l’œuf sans passer sur le miel, et l’introduction d’une seule larve, parmi toutes celles qui attendent dans la toison de l’abeille, il ne peut y avoir que l’explication suivante : c’est de supposer qu’au moment où l’œuf de l’Anthophore s’échappe à demi de l’oviducte, parmi les Sitaris accourus du thorax à l’extrémité de l’abdomen, un plus favorisé par sa position se campe à l’instant sur l’œuf, pont trop étroit pour deux, et arrive avec lui à la surface du miel. L’impossibilité de remplir autrement les deux conditions que je viens d’énoncer, donne à l’explication que je propose un degré de certitude presque équivalent à celui que fournirait l’observation directe, malheureusement impraticable ici. Cela suppose, il est vrai, que la microscopique bestiole, appelée à vivre en un lieu où tant de dangers la menacent d’abord, cela suppose, dis-je, une inspiration étonnamment rationnelle, et appropriant les moyens au but avec une logique qui nous