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Ses mandibules acérées doivent donc s’excaver en cuiller pour pouvoir puiser le miel ; ses pattes, ses cirrhes, ses appareils d’équilibre, doivent disparaître comme inutiles, et mieux comme nuisibles, puisque maintenant tous ces organes ne peuvent que faire courir de grands périls à la larve en l’engluant dans le miel ; sa forme svelte, ses téguments cornés, ses ocelles n’étant plus nécessaires dans une cellule obscure où le mouvement est impossible, où aucun rude contact n’est à craindre, peuvent également faire place à une cécité complète, à des téguments mous, à des formes lourdes et paresseuses. Cette transfiguration, que tout démontre indispensable à la vie de la larve, se fait par une simple mue.

On ne voit pas aussi bien la nécessité des morphoses suivantes, si anormales que rien de pareil n’est connu dans tout le reste de la classe des insectes. La larve qui s’est nourrie de miel revêt d’abord une fausse apparence de chrysalide, pour rétrograder après vers la forme précédente, bien que la nécessité de ces transformations nous échappe totalement. Ici je suis obligé d’enregistrer les faits et d’abandonner à l’avenir le soin de les interpréter. Les larves des Méloïdes subissent donc quatre mues avant d’atteindre l’état de nymphe ; et après chaque mue leurs caractères se modifient de la manière la plus profonde. Pendant tous ces changements extérieurs, l’organisation interne reste invariablement la même, et ce n’est qu’au moment où apparaît la nymphe que le système nerveux se concentre, et que se développent les organes reproducteurs, absolument comme cela se passe chez les autres coléoptères.

Ainsi, aux métamorphoses ordinaires qui font succes-