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foyers de l’incitation des muscles. Suivant la structure de l’appareil nerveux, le nombre et la concentration des ganglions, l’opérateur se borne à un coup de lancette, ou bien en donne deux, trois et davantage. L’anatomie précise de la victime dirige l’aiguillon.

L’Ammophile hérissée a pour gibier une chenille dont les centres nerveux, distants l’un de l’autre et jusqu’à un certain point indépendants dans leur action, occupent un à un les divers anneaux de l’animal. Cette chenille, très vigoureuse pièce, ne peut être emmagasinée dans la cellule, avec l’œuf de l’hyménoptère sur le flanc, qu’après avoir perdu toute mobilité. Un mouvement de sa croupe écraserait cet œuf contre la paroi.

Or un anneau rendu immobile par la paralysie n’entraînerait pas l’insensibilité de l’anneau voisin, à cause de l’indépendance relative des foyers d’innervation. Il faut alors que tous les anneaux soient opérés, l’un après l’autre, du premier au dernier, du moins les plus importants. Ce qui dicterait le physiologiste le plus expert, l’Ammophile l’accomplit : son aiguillon se porte d’un anneau au suivant à neuf reprises différentes.

Elle fait mieux. La tête est encore indemne ; les mandibules jouent, elles pourraient saisir pendant le trajet quelque fétu fixé au sol et opposer au charroi une résistance insurmontable ; le cerveau, centre nerveux primordial, pourrait provoquer une sourde lutte, bien gênante avec pareil fardeau. Il convient d’éviter ces entraves. La chenille sera donc plongée dans un état de torpeur qui abolisse jusqu’aux velléités de défense. L’Ammophile y parvient en mâchonnant la tête. Elle