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favorable au charroi et à l’emmagasinement. Dans la première, un fait aussi remarquable ne m’aurait pas échappé ; il ne s’est donc pas produit. Alors la méthode de la compression cérébrale est une ressource que l’hyménoptère emploie à sa guise, lorsque les circonstances le réclament, lorsque la proie, par exemple, paraît devoir opposer quelque résistance pendant le trajet.

Le mâchonnement des ganglions cervicaux est facultatif ; l’avenir de la larve n’y est pas intéressé ; l’hyménoptère le pratique, lorsque besoin en est, pour se faciliter le travail de transport. Le Sphex languedocien, que j’ai vu assez souvent à l’œuvre après m’avoir coûté tant de peine jadis, n’a pratiqué qu’une seule fois cette opération, sous mes yeux, à la nuque de son Ephippigère. Réduite à ses éléments invariables, absolument nécessaires, la tactique de l’Ammophile hérissée consisterait ainsi dans la multiplicité des coups d’aiguillon, distribués un à un dans la totalité ou la presque totalité des centres nerveux longeant la ligne médiane de la face inférieure.

Avec l’art meurtrier de l’hyménoptère mettons en parallèle l’art meurtrier de l’homme, de l’homme pratique, dont le métier est de tuer rapidement. J’évoquerai ici un souvenir d’enfance. Petits écoliers d’une douzaine d’années, on nous expliquait les infortunes de Mélibée, versant ses chagrins dans le sein de Tityre, qui lui offre ses châtaignes, son fromage et sa couche de fougère fraîche ; on nous faisait réciter un poème de Racine fils, la Religion. Singulier poème, en vérité, pour des enfants plus soucieux de billes que de théologie ! Il m’en est resté tout juste deux vers et demi :