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disposé, peuvent devenir l’origine d’une habitude, transmissible par hérédité. Nous regarderions comme un mauvais plaisant celui qui viendrait nous dire que le descendant du desnucador, par cela seul qu’il est le fils de son père, sans l’intervention de l’exemple et de la parole, connaît à fond l’art d’abattre les bœufs. Le père ne travaille pas de sa lame un petit nombre de fois, par hasard ; il opère tous les jours, à nombreuses reprises, il procède avec réflexion. C’est son métier. Cet exercice de toute la vie durant fait-il habitude transmissible ? Sans l’enseignement, les fils, les petits-fils, les arrière-petits-fils en savent-ils plus long ? C’est toujours à recommencer. L’homme n’est pas prédisposé pour cette tuerie.

Si de son côté l’hyménoptère excelle dans son art, c’est qu’il est fait pour l’exercer ; c’est qu’il est doué, non seulement d’outils, mais encore de la manière de s’en servir. Et ce don est originel, parfait dès le début ; le passé n’y a rien ajouté, l’avenir n’y ajoutera rien. Tel il était, tel il est et tel il sera. Si vous n’y voyez qu’une habitude acquise, que l’hérédité transmet en l’améliorant, expliquez-nous au moins comment l’homme, le plus haut degré d’évolution de votre plasma primitif, est privé de semblable privilège. Un insecte de rien transmet à son fils son savoir-faire, et l’homme ne le peut. Quel avantage incommensurable pour l’humanité si nous étions moins exposés à voir l’oisif remplacer le laborieux, le crétin l’homme de talent ! Ah ! pourquoi le protoplasme, évoluant d’être en être par ses propres énergies, n’a-t-il pas conservé jusqu’à nous quelque peu de cette merveilleuse puissance dont il gratifiait si largement l’insecte ! C’est