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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

l’Épeire dans l’art des gluaux ? Que de savante industrie pour capturer une Phalène !

Et puis, quelle fougue de fabrication ! Connaissant le diamètre de l’orbe et le nombre de tours, il est aisé de calculer la longueur totale de la spire à gluaux. On trouve ainsi qu’en une séance, toutes les fois qu’elle refait sa toile, l’Épeire angulaire produit une vingtaine de mètres de fil visqueux. L’Épeire soyeuse, plus habile, en produit une trentaine. Or, pendant deux mois l’Épeire angulaire, ma voisine, a renouvelé son piège presque chaque soir. Dans cette période, elle a manufacturé plus d’un kilomètre de ce fil tubulaire qui se roule en torsade serrée et se gonfle de glu.

J’aimerais qu’un anatomiste mieux outillé que je ne le suis, et doué d’une vue moins fatiguée que la mienne, nous expliquât le travail de la merveilleuse corderie. Comment la matière à soie se moule-t-elle en tube capillaire ; comment ce tube s’emplit-il de glu et se dispose-t-il en torsade serrée ? Et comment encore la même tréfilerie fournit-elle des fils communs, travaillés en charpente, en mousseline, en satin ; puis une fumée rousse dont se gonfle la sacoche de l’Épeire fasciée : puis les galons noirs tendus en méridiens sur la même sacoche ? Que de produits venus de cette curieuse usine, la panse d’une Araignée ! Je vois les résultats sans parvenir à comprendre le fonctionnement de la machine. Je livre le problème aux maîtres du scalpel et du microtome.