Page:Fabre d’Églantine - Le Philinte de Molière, 1878.djvu/36

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Vous fûtes mon ami…

PHILINTE.

Vous fûtes mon ami…Quand on se voit pressé.

ALCESTE.

J’en suis honteux pour vous.

PHILINTE.

J’en suis honteux pour vous.Dites embarrassé.

ALCESTE.

Embarrassé, grand Dieu ! Si sur votre paresse
Je ne jetais l’affront que vous fait votre adresse,
Si ces principes-là conduisaient votre cœur,
Je ne vous verrais plus qu’avec des yeux d’horreur.
Et voilà donc comment les heureux de la terre
Savent se dispenser aujourd’hui de bien faire !
Tout est bien, dites-vous ? Et vous n’établissez
Ce système accablant, que vous embellissez
Des seuls effets du crime et des couleurs du vice,
Que pour vous dispenser de rendre un bon office
À quelque infortuné, victime d’un pervers !
Allez ! pour vous punir d’un si cruel travers,
Je ne voudrais vous voir qu’un instant en présence
De cet infortuné réclamant la vengeance
Et du ciel et des lois, au moment douloureux
Qu’il se verra frappé de ce coup désastreux.
Ses cris, son désespoir, sa famille affligée,
Sa probité, peut-être, à ses biens engagée,
Verriez-vous tout cela d’un œil sec et cruel ?

PHILINTE.

Je lui dirais : « Mon cher, votre état actuel,
Croyez-moi, chaque jour est celui de mille autres.
Tel nomme était sans biens, et s’enrichit des vôtres.
Vous les aviez : pourquoi ne les aurait-il pas ?
Rappelez la fortune, et courez sur ses pas.
Quand vous l’aurez, craignez qu’on ne vous la dérobe ;
Vous n’êtes qu’un atome et qu’un point sur le globe.
Voulez-vous qu’en entier il veille à votre bien.
Il s’arrange en total ; » en total, tout est bien.

ALCESTE.

Non, je ne croyais pas, je dois enfin le dire,