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POUR QU’ON LISE PLATON

souffrira dans la poursuite de ses plaisirs… Il interdira donc à ce qu’il aime toutes les relations qui pourront le rendre plus parfait… Il s’efforcera en tout et partout de le maintenir dans l’ignorance pour le forcer à n’avoir d’yeux que pour lui, si bien que l’objet de son amour lui sera d’autant plus agréable qu’il se sera fait plus de tort à lui-même. Il lui fera un mal irréparable en l’éloignant de ce qui pourrait éclairer son âme, des discours des sages… Ainsi, au point de vue moral, il n’est pas de plus mauvais guide ni de compagnon plus mauvais qu’un homme amoureux. »

Surtout, et c’est déjà dit, mais insistons un instant, l’amant sera jaloux, et en cela, non seulement l’ennemi du genre humain, comme nous en sommes convenus, mais l’ennemi même de l’objet aimé. Il le souhaitera pauvre pour l’avoir plus complètement dans sa dépendance, faible du reste et incapable de s’enrichir ou seulement de gagner sa vie, pour la même raison ; sans parents, sans amis, sans soutiens pu sans surveillants. « Il le verrait avec plaisir perdre son père, sa mère, ses parents, ses amis, qu’il regarde comme des censeurs et des obstacles à son doux commerce. »

D’autre part, toujours soupçonneux parce qu’il est toujours craintif, « il poursuivra ce qu il aime d’une inquisition continuelle relativement à toutes