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POUR QU’ON LISE PLATON

loin de lui et comme infiniment au-dessus de lui un bien suprême qui n’a aucun rapport avec ce que l’homme appelle les biens.

Si l’on presse un peu cette idée un peu vague, on voit que ce bien suprême, c’est le beau, le beau résultant d’une harmonie que le sage réussit à entrevoir dans l’ensemble du monde et doit réussir à réaliser en lui. Si l’on veut ramener sur la terre, pour ainsi parler, cette idée du souverain bien et l’appliquer aux choses pratiques, on voit que ce souverain bien et ce beau suprême considérés humainement, c’est la justice. L’homme est un être qui a été doué de la faculté de distinguer le juste de l’injuste et encombré d’une foule de passions qui l’empêchent de faire ce départ. Ces passions sont les maladies de l’âme. Se débarrasser de toutes ces passions pour se faire une âme saine et clairvoyante et, cela obtenu, distinguer le juste de l’injuste, c’est le tout de l’homme ici-bas. Et quand on s’est habitué à distinguer le juste de l’injuste et à vivre selon cette distinction, on est parfaitement heureux dans toute la mesure du bonheur humain.

Car alors on ne commet pas l’injustice, et commettre l’injustice est un affreux malheur ; et on peut la subir et on la subit même souvent ; mais la subir n’est nullement un malheur, et même est un