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POUR QU’ON LISE PLATON

plaisir très vif et très pur, n’y ayant plaisir plus grand que de se sentir infiniment supérieur à qui s’imagine nous opprimer.

La liberté n’est pas précisément le souverain bien terrestre, mais elle en est le signe. Le souverain bien terrestre, c’est le sentiment de la justice et la pratique de la justice. Mais la liberté est le signe que l’on jouit du souverain bien. Or quand on sent le juste et quand on le pratique, on est parfaitement libre, puisqu’on l’est à l’égard des passions qui sont nos tyrans intérieurs et puisqu’on l’est à l’égard des injustes qui sont nos tyrans extérieurs et qui croient nous opprimer, mais ne nous oppriment point, en tant que nous nous sentons beaucoup plus supérieurs à eux qu’ils ne se croient supérieurs à nous.

Le juste est donc un homme qui est sain, qui est harmonieux et qui est libre. Il n’y a pas de plus grand bonheur ici-bas. Ainsi vécut et mourut Socrate. Il n’y a rien de meilleur à souhaiter que la vie de Socrate, si ce n’est sa mort. La morale de Platon c’est l’imitation de Socrate.

Cette morale est donc très pure, très élevée et très noble. Il lui manque presque complètement, complètement peut-être, une chose très considérable ; c’est la bonté. Il n’y a presque aucune tendresse humaine dans la morale de Platon. Platon,