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POUR QU’ON LISE PLATON

étant l’homme et l’homme traité sérieusement, le beau moral est l’élément essentiel de l’œuvre : comédie élevée, poème épique, tragédie, éloquence religieuse, et ici on ferait remarquer que le problème moral n’est pas autre chose que le fond même de l’œuvre et que l’artiste et le psychologue moraliste se confondent.

Le tort de Platon est donc d’avoir parlé de l’art en général sans y faire les distinctions nécessaires. Je reconnais que, comme on fait toujours pour la clarté de l’exposition, j’ai un peu forcé les choses. J’en ai fait dire à Platon un peu plus qu’il n’en a dit. Il sent si bien lui-même qu’on ne peut pas dire de l’art tout entier ce qu’il en affirme, qu’il ne parle en général que des arts littéraires pour assurer qu’ils doivent être des serviteurs de la morale et qu’ils sont des dépendances de la morale. Il ne prend ses exemples, d’ordinaire, que dans les arts littéraires, et c’est moi qui lui ai fait dire, conformément du reste à sa théorie, que le sculpteur, le peintre et l’architecte doivent être des moralistes. Mais sa doctrine générale et très formelle contient pourtant cette conclusion, et rien ne montre comme le soin qu’il prend de ne pas aller tout à fait jusque là, que sa théorie n’est pas juste de tout point et qu’il le sent.

IL a eu tort surtout d’affirmer, même en général,