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POUR QU’ON LISE PLATON

peint par les côtés par où vous ressemblez à la nature et alors, encore, on peut n’avoir pas souci de moralité ; ou l’on vous peint en s’appliquant à ce qui vous distingue de la nature et alors, en ne cherchant que le beau, on trouve le bien et on ne peut pas ne pas le trouver. Votre essence même est donc le bien, et vous n’êtes beaux que dans le bien C’est votre façon d’être matière d’art. C’est votre manière de rayonner. Le beau naturel, c’est le beau. Le beau humain, c’est le bien. Le beau dans l’homme, c’est la splendeur du bien.

Il me semble que c’est ici la théorie sur l’art qui contient le plus de moralité.

Enfin, comme subsidiairement, Platon me semble encore avoir eu tort en ceci. Il veut formellement que l’artiste en travaillant ait une intention morale ; il veut même qu’on l’y contraigne Or rien n’est contraire et comme hostile au travail artistique, rien n’est désastreux pour lui comme cette préoccupation. Le souci de moraliser est aussi funeste à l’artiste, qui n’a qu’à chercher le beau, que le souci de chercher le beau est funeste au moraliste et au prédicateur. Le souci de chercher le beau rend frivole le prédicateur et le souci de moraliser refroidit et paralyse l’artiste. Il l’écarte et de la. vérité et de la beauté. Il fait qu’il poursuit deux buts et qu’il suit deux chemins, ce