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POUR QU’ON LISE PLATON

paraît la vraie raison du peu de goût qu’ont les hommes pour les œuvres d’art à intention moralisantes, plus ou moins secrètes, plus ou moins avouées. L’art ne doit pas être une sophistique, et ce procédé est une sophistique, une sophistique honnête, une sophistique digne de pardon, une sophistique respectable ; mais encore une sophistique, et qui indique chez celui qui l’emploie, soit peu de confiance dans ses talents d artiste, puisqu’il a recours à d’autres ressources ; soit peu de confiance en la vérité, puisqu’il ne la montre qu’en la déguisant ou la parant ; soit peu de confiance et d’un côté et de l’autre.

Donc, à ce point de vue encore, Platon ne me paraît pas être dans le vrai. Gœthe me paraît être beaucoup plus dans la vérité quand il dit : « Je ne me suis jamais occupé du résultat pratique de mes œuvres. Je suis porté à croire qu’elles ont t’ait plutôt du bien ; mais je n’ai pas visé à cela. L’artiste n’est tenu qu’à réaliser son rêve dans ses écritures. Il devient ensuite ce qu’il peut dans les imaginations des hommes. C’est à eux d’en extraire le bien et en rejeter le mal. Ce n’est pas à l’artiste de peser sur les consciences. Il n’a qu’à épancher son âme. » C’est ceci même qui me semble la vérité et le bon sens.

Il reste, cependant, de toute cette théorie de