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POUR QU’ON LISE PLATON

de parti pris les forces naturelles de l’humanité et en particulier du corps social.

Ainsi parlait Zarathoustra, qui s’appelait en ce temps-là Calliclès et qui du reste avait plusieurs autres noms harmonieux.

Platon lui répondait ou leur répondait à peu près de la manière suivante :

Tout cela est affaire de définitions, et il est bien possible que ce que vous appelez la vie soit une espèce de mort, et très analogue à la mort elle-même, et que réciproquement ce que vous appelez la mort soit la vie, et la vie concentrée et intense, si l’on peut ainsi parler. C’est le mot d’Euripide : « Qui sait si la vie n’est pas pour nous une mort et la mort une vie ? » Entendez : qui sait si ce qui vous semble la vie n’est pas la mort même ? Cet homme à belles passions et à beaux caprices me fait l’effet à moi, comme à un poète sicilien, je crois, non pas d’une magnifique force de la nature, comme vous dites, plus en poète, vous aussi, qu’en philosophe, mais tout simplement d’un tonneau percé.

Cette partie de l’âme où résident les passions et qui est intempérante, comme vous dites vous-même, c’est-à-dire qui ne sait rien retenir, est bien un tonneau percé, qui est avide, qui est insatiable et qui laisse échapper tout ce qu’il reçoit à mesure qu’il le reçoit et croit le saisir. Le pas-