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POUR QU’ON LISE PLATON

famille qui est l’aristocratie, on voit peu comment l’enfant collectif pourra être élevé.

— Comme l’enfant adopté !

— Je ne crois pas. L’enfant adopté est un enfant choisi ; l’enfant collectif est un enfant trouvé, un enfant du hasard qu’il n’y a guère de raison pour que quelqu’un aime, soigne, cultive et dresse bien. Les enfants des guerriers de Platon ne seront pas la fleur et le surgeon verdissant de la cité guerrière, ils en seront l’encombrement et le poids mort. Platon prévoit le cas où le rejeton de la caste noble sera reconnu indigne d’elle et replongé dans la classe basse. Je ne serais pas étonné que presque tous les fils des guerriers fussent précisément dans ce cas.

Et, d’autre part, j’ai peu besoin de démontrer que la promiscuité féminine, môme relativement réglée, comme elle l’est par Platon, est, pour une élite, absolument comme pour tout autre groupement humain, une cause d’affaiblissement sans pareille. Les deux vertus essentielles, et c’est-à-dire les deux forces essentielles d’une aristocratie, d’une élite quelle qu’elle soit, du reste, sont la pauvreté volontaire et la chasteté volontaire. Or il n’y a que deux manières d’être chaste, c’est de n’avoir pas de femme ou de n’en avoir qu’une.

Tout compte fait, Platon a manqué son aristocra-