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POUR QU’ON LISE PLATON

s’en souviennent, ils en retrouvent en eux des traces et ils ont à le réparer en eux, et en le réparant en eux, à s’élever de plus en plus vers lui. L’homme ne crée pas le divin, il le restitue. Il n’y va pas, il y revient. Au commencement était Dieu ; au bout de la route, si on ne s’égare pas, il y a Dieu.

Mais, au fond, l’idée est la même. Est platonicien tout homme qui croit que la destinée de l’homme est de trouver l’idée du parfait et de s’y attacher comme à l’idée du port.

Ceci n’est pas une idée d’obligation. Le devoir est, à proprement parler, étranger à Platon, comme en général à tous les Grecs. Le devoir est plutôt une idée latine. L’homme, pour Platon, n’a pas précisément le devoir de s’attacher à la perfection ; il est dans sa destinée, et c’est-à-dire dans sa nature, s’il la comprend bien, de s’y attacher. L’idée de perfection n’est pas un impératif ; c’est simplement la santé de l’âme et la beauté de l’âme. La conscience platonicienne est une hygiène intellectuelle et une esthétique. Le bien est bien parce qu’il est sain et parce qu’il est beau. Le juste est bien parce que l’injuste est incohérent, désordonné, inharmonique et très laid.

Platon, comme Nietzsche, malgré les différences,