Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/205

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Elle la lui jeta au nez. Indolent, il s’assit à la turque pour lire à son aise :

— Tiens !… – dit-il.

Curieuse, elle se rapprocha :

— Quoi donc ?

— Lisez…

Elle s’assit à côté de lui. Il enlaça sa taille. Et ils lurent ensemble, joue à joue.


« Mon ami,

« Je ne sais plus du tout ce que je vais devenir. Je suis très malheureuse. Tout le monde autour de moi est méchant. Vous seul, avec madame Terrien, avez eu un peu de pitié pour la pauvre Alice. Alors, je viens vous demander conseil !… Conseil ; protection aussi… tout ce que vous pourrez me donner… tout ce que votre cœur vous inspirera… Ça ne s’arrange pas du tout, ma vie. Il faut que je vous explique : d’abord mon mariage est défait, mon fiancé ne m’aimait pas. Il aimait seulement ma dot. Et j’avais été terriblement humiliée, en découvrant ça. Tout de même je m’étais résignée. Mon confesseur m’avait tant répété que le vrai bonheur d’une femme n’est pas d’être aimée selon la chair, mais d’être estimée, honorée, respectée, et de vivre au coin du feu !… Oui, je m’étais résignée à cette vie-là. Seulement, avant-hier, j’ai compris tout à coup que mon fiancé ne me respectait pas plus qu’il ne m’aimait. Et alors je n’ai plus voulu de lui. Ç’a été terrible. Mes parents sont entrés dans une fureur folle. Si je n’ai pas été battue, c’est tout juste… Ça ne fait rien : je me suis révoltée, j’ai tenu bon, je ne