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LE MÉGHA-DOUTA.

6« Tu es né d’une famille célèbre dans le monde, je le sais, dit le Génie ; ta race est issue des ailes, que Maghavat trancha aux montagnes ; tu es son premier ministre et tu peux changer de forme à ta volonté : c’est donc à toi, que j’envoie ma supplique, moi, que la tyrannie du sort a rejeté loin de mon épouse, Serait-ce une vaine prière ? Non ! car il vaut mieux, pour obtenir l’objet de son désir, le demander à un sujet de haute condition qu’à un être de bas étage !

7» Nuage, tu es le refuge des infortunés : porte donc ces nouvelles de moi à mon épouse, dont m’a séparé la colère du Dieu, qui préside aux richesses ! Il te faut diriger ta course vers le pays, qu’habitent les princes des Yakshas, vers cette magnifique Alakâ, dont les bocages suburbains et les riches palais sont lavés par les rayons de la lune, diadème éclatant sur la tête de Çiva.

8» Leurs cheveux noués à la manière des veuves, les épouses des maris en voyage vont donc enfin te contempler et respirer avec une pleine confiance maintenant, que te voilà monté dans les routes du vent ! Qui pourrait en effet devant ton approche ne pas tourner les yeux de sa pensée vers le toit, où son épouse gémit de son absence ? Qu’il n’y ait donc plus d’amant, si ce n’est moi seul, séparé de l’être, auquel tient son bonheur !

9Comme il te pousse doucement, doucement, ce vent favorable ! Avec quelle mélodieuse voix chante ce tchâtaka de bon augure, avide de boire l’eau, que ton sein va lui verser ! Déjà, tressant leur guirlande, les grues viennent t’escorter au milieu du ciel, nuage ravissant aux yeux, amas de vertus pour la fécondation des semences !