Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MAT
1469

gique devient puissant. En voici une illustration. Les partisans de l’ « économisme historique » nous disent : « Si le mode de production restait immobile, tout l’ordre social, politique et intellectuel serait frappé d’immobilité cadavérique. » Cette supposition devrait prouver que c’est le mode de production qui est le facteur primordial de l’évolution humaine. Mais, pourquoi donc le mode de production lui-même change-t-il ? Il y a donc quelque chose qui le fait changer. Il existe une force qui est plus profonde, plus forte encore que le mode de production lui-même, puisqu’elle le soumet à son influence, le fait changer, le met en mouvement. Autrement, le mode de production lui-même resterait immobile. Cette force est justement la force créatrice de l’homme. Au cours de l’évolution historique, elle s’infiltre de plus en plus dans le processus purement matériel. Ce dernier lui cède du terrain, tous les jours davantage. Lentement, mais sûrement, la force créatrice de l’homme et ses résultats démontrent la tendance à dominer les forces « matérielles », à les soumettre, à s’installer en maîtres absolus.

C’est la faculté créatrice de l’homme qui, véritable « force motrice », donne l’élan à son évolution historique. C’est elle qui se trouve à la base de cette évolution. Ses manifestations et son influence immédiates étant insignifiantes au début, elle s’affirme de plus en plus au cours de cette évolution, et tend à devenir son facteur prépondérant.

Cette constatations faite, je n’ai plus à choisir entre le « matérialisme » et l’ « idéalisme » historiques. Pour moi, « le processus historique » est un mouvement formidable de très nombreux éléments de toute sorte, mouvement qui réalise une vaste synthèse de facteurs purement matériels et psychiques, et où les premiers sont remplacés, peu à peu, par les derniers. Je réunis donc le « matérialisme » et l’ « idéalisme » historiques en un immense mouvement général où les éléments et les forces purement matériels, prépondérants au début, cèdent peu à peu par leur influence à celle de la force psychique créatrice de l’homme, avec toutes ses manifestations innombrables.

Je soumets au lecteur un petit croquis qui exprime bien ma façon de comprendre le processus historique :

Le côté A y représente les débuts de l’évolution humaine où la faculté créatrice de l’homme, en état potentiel, ne se manifestait presque pas, et où les forces matérielles primaient tout. Le côté Z est celui de l’avenir lointain de cette évolution où l’influence de la force créatrice de l’homme l’emportera sur celle des forces matérielles. La partie noire montre l’importance des facteurs purement matériels, en décroissance progressive. La partie blanche représente le rôle de la force créatrice et conscience de l’homme, en accroissement constant. La flèche indique le mouvement historique de A vers Z. Et la ligne m n désigne, à peu près, l’époque actuelle et l’importance relative des deux sortes de facteurs, telle que je me l’imagine aujourd’hui. — Voline.

Ouvrages a consulter

Sur MARXISME. — Karl Marx : (Le Capital) : Le procès de la production du capital (4 vol.) ; Le procès de la circulation du capital (4 vol.) ; Le procès d’ensemble de la production capitaliste (4 vol.) ; Critique de l’économie politique ; Misère de la philosophie ; Salaires,

prix, profits ; Critique du programme de Gotha ; Lettres à Kugelman, etc. — Marx et Engels : Manifeste communiste. — Engels : Philosophie, économie, politique, socialisme. Testament politique ; La guerre des paysans en Allemagne, etc.

Cafiero : Abrégé du « Capital » de Karl. Marx. — Proudhon : Philosophie de la misère ; Système des contradictions économiques, etc. — M. Bakounine : Dieu et l’Etat ; Œuvres (6 vol.) ; Correspondance. — James Guillaume : Etudes révolutionnaires (2 vol.) ; L’Internationale (souvenirs) (4 vol.) — G. Sorel : La décomposition du marxisme, etc. — Desliniéres : Délivrons-nous du marxisme, etc.

P. Gemahling : Les grands économistes. — Ch. Gide et Rist : Histoire des doctrines économiques. — Durkheim : Le socialisme. — J. Longuet : La politique internationale du marxisme. — J. Lapidus et K. Ostrovitianov : Précis d’économie politique ; la Philosophie du marxisme. — Plekhanov : Les questions fondamentales du marxisme. — Riazanov : Marx et Engels, etc.

Ainsi que les ouvrages mentionnés à anarchisme, communisme, socialisme, syndicalisme, etc. Voir aussi ci-après la bibliographie de « matérialisme historique ».

Sur Matérialisme historique. — Les œuvres de Marx et Engels, etc. — Seligman : L’interprétation économique de l’histoire. — Labriola : Essai sur la conception matérialiste de l’histoire. — Engels : L’origine de la famille, de la propriété et de l’Etat, etc. — J. Jaurès et P. Lafargue : Idéalisme et matérialisme dans la conception de l’histoire. — Pokrovski : Pages d’histoire. — M. Mondolfo : Le matérialisme historique. — N. Boukharine ;  : La théorie du matérialisme historique. — P. Lafargue : Le déterminisme économique de Karl Marx. — M. Eastman : La science de la révolution. — H. de Man : Au-delà du marxisme. — H. Sée : Matérialisme historique et interprétation économique de l’histoire. — M. Beer : Histoire générale du socialisme et des luttes sociales, etc.)

Voir aussi la bibliographie de marxisme et celles mentionnées aux études sociales et économiques.


MATERNITÉ n. f. rad. maternel (du latin maternus). Le fait d’être mère, de mettre au monde un ou plusieurs enfants.

L’instinct maternel n’est pas aussi universel qu’on le pourrait penser. Il est des femelles animales : chattes, rates, souris qui dévorent leurs petits dès qu’elles les ont mis au jour ; bien des poules mangeraient leurs œufs si les éleveurs ne prenaient la précaution de les leur enlever.

Néanmoins, ces infanticides animaux sont l’exception. L’instinct maternel est la sauvegarde de l’espèce, il est donc la loi générale. Tout le monde a pu admirer avec quel soin la mère chatte allaite ses petits, avec quel amour elle les lèche et avec quelle délicatesse elle les saisit par la peau du cou pour les transporter d’un lieu à un autre.

Chez les femmes l’instinct maternel n’est pas également développé ; il en est qui ne le possèdent pas. Chez presque toutes il faut, pour qu’il apparaisse, un certain temps. La nouvelle accouchée toute pantelante ne pense pas à son enfant. Ce n’est qu’au bout de quelques jours qu’elle commence à l’aimer.

L’allaitement au sein semble intensifier l’amour maternel. La mère éprouve, lorsque l’enfant tête, un plaisir sexuel et cela ne fait que resserrer le lien entre la mère et l’enfant.

La misère, les maternités trop nombreuses affaiblissent l’amour de la mère pour ses enfants ; à ce point de vue on peut dire que l’amour maternel est un luxe ; dans les familles pauvres l’enfant reçoit plus de coups que de caresses. Les noms de mépris que l’argot donne au bébé : le salé, le lardon, montrent que les pauvres