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ij PREFACE


qui a ses avantages. Il parait pourtant que le plus grand nombre des lecteurs aime mieux la première ; et dans les Dictionaires de Richelet et de Trévoux, on lui a doné la préférence, quand on a pu le faire. Mais ce qui est comun aux deux méthodes, c’est que ces Exemples sont souvent anciens, recueuillis des premières Editions ; quelquefois contraires entr’eux, presque toujours destitués de remarques ; et que n’étant pas apréciés au flambeau de la critique, ils sont souvent plus propres à égarer qu’à guider dans ce labyrinte. = Les Remarques et les Observations seraient plus utiles pour résoudre les doutes, si elles étaient en plus grand nombre ; si elles s’étendaient à tous les mots de la Langue, qui en sont susceptibles ; si plusieurs n’avaient pas vieilli avec les expressions, qu’elles critiquent, ou qu’elles aproûvent ; si elles n’étaient pas quelquefois oposées les unes aux aûtres ; si elles étaient toujours fondées en principes ; si elles n’étaient pas souvent arbitraires, et le fruit du caprice ou du goût particulier des Auteurs. Les Juges, dans cet Empire gramatical, ont besoin d’être jugés eux-mêmes. Dâilleurs, ces Remarques ont l’inconvénient des Règles : elles sont éparses dans diférens livres, et y sont entassées sans méthode. La Touche est le seul, qui les ait rangées par ordre alphabétique, et La Touche est peu conu et peu consulté. = Outre cela, il est un grand nombre d’Observations judicieuses et utiles, répandûes dans les diférentes Gramaires, dans les Journaux de Litératûre, dans les Comentateurs de nos Poètes et autres Écrivains, non moins dificiles à retrouver au besoin, plus dificiles même, parce qu’on n’a pas la ressource des Tables pour les chercher. Et quand nous n’aurions fait que les réunir dans un même ouvrage, et les disposer dans l’ordre le plus comode pour en faciliter la recherche, nous croirions toujours avoir rendu un grand service, non seulement à toutes les Nations, chez qui notre Langue et notre Litératûre sont familières ; non seulement aux jeunes gens et aux habitans des diférentes Provinces de France, à qui ce secours est absolument nécessaire, mais aux Français même de la Capitale, sans en excepter les Gens de lettres, souvent plus ocupés des chôses et des pensées que de l’emploi et de l’arrangement des mots, et plus jaloux de l’élégance que de la correction du style, quoiqu’il ne puisse y avoir de véritable élégance sans correction.

Mais nous n’avons pas borné là notre travail. Nous avons joint aux Remarques des Gramairiens et des Critiques, qui nous ont précédés, un nombre si considérable d’Observations gramaticales et critiques, qu’elles égalent, si elles ne le surpâssent, l’ensemble de toutes celles qu’on troûve répandûes dans les bons Auteurs, qui ont travaillé sur la Langue Française ([1]). Nous ne nous sommes pas contentés de raporter leurs remarques, nous en avons fait quelquefois la critique, avec les égards que méritent des Auteurs si estimables, et qui nous ont été si utiles pour la composition de ce Dictionaire.

Ce n’est donc pas ici un Ouvrage de pure compilation, et nous espérons qu’on ne nous fera pas l’injustice de nous apliquer ce que dit M. l’Abbé de Fontenai, au sujet d’une aûtre production litéraire, que : ” c’est un de ces Livres, fait sur des livres, un de ces livres retournés, qui ne corrigent rien, ne rectifient rien.

  1. (*) Telles sont les Remarques de MM. de l’Académie Française, de MM. de Port-Royal ; de Regnier des Marais ; Vaugelas, Th. Corneille, Ménage, Bouhours, Andry de Bois-regard., Dangeau, La Touche, des Abbés Girard et Des Fontaines ; du P. Buffier ; de Brossette et St. Marc, comentateurs de Boileau, de Voltaire et Bret ; l’un comentareur de Corneille et l’aûtre de Molière ; de Duclos, Froment, du Marsais, de l’illustre Abbé d’Olivet, à qui la Langue a tant d’obligations, à qui j’en ai moi-même de si essentielles, et dont je dois chérir et respecter toute ma vie le souvenir ; de Restaut, de MM. Beauzée, de Wailli, Harduin, d’Açarq, de Fréron, de MM. les Abbés Grozier et Royou, de M. Geofroi et des aûtres Auteurs de l’Année Littéraire ; de M. l’Abbé Roubaud, Auteur des nouveaux Synonymes François, des Auteurs du Mercùre, et de ceux du Journal de Paris, etc. etc.