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MANUEL DU SOLDAT CHRÉTIEN (1503).

il est à Louvain où il séjourne quelque temps[1]. Une seule lettre sans intérêt, adressée à Pierre Ægidius, l’éditeur des lettres latines d’Ange Politien, est de l’année 1503 qu’Érasme passe à Paris[2]. Cette année, qui est celle de la mort d’Alexandre VI, Érasme publiait un court traité de morale chrétienne, entrepris, paraît-il, à la prière d’une dame pour la conversion de son mari, et qu’il intitulait Enchiridion militis christiani. Pour justifier ce titre, Érasme avertissait qu’il voulait comme armer chaque chrétien d’un petit poignard facile à porter et utile à sa défense, dont il ne se séparât nulle part, pas même au lit et à la table. Le livre, assez froid d’ailleurs, et composé de treize chapitres peu liés entre eux, fut cependant, on ne saurait dire pourquoi, l’un des ouvrages d’Érasme le plus fréquemment traduits.

C’est encore de Paris qu’Érasme écrit en 1504 à Colet, doyen de Saint-Paul, dont l’amitié, il l’espère, n’est pas refroidie par son trop long silence. Il lui apprend qu’il n’a pas poursuivi l’étude de l’hébreu dont les difficultés l’ont rebuté, et qu’il s’applique depuis trois ans à se perfectionner dans la connaissance du grec. Il lui adressait en même temps une curieuse dissertation théologique sur les paroles du Christ aux approches de la passion : « Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi[3] ! »

  1. Le séjour d’Érasme dans le Brabant en 1502 passe presque inaperçu, si nous ne consultons que ses lettres. M. E. Rottier, dans son Mémoire sur la Vie et les travaux d’Érasme (1854), lui assigne une importance considérable, et, nous le croyons, exagérée. Il n’en donne pas moins des détails intéressants sur l’état de l’Université de Louvain à cette époque, et sur les relations d’Érasme avec le groupe des savants qui s’y trouvaient alors réunis. V. ch. ii, p. 22 et sqq.
  2. Ép. 101.
  3. Erasmi disputatiuncula de tædio, pavore, tristitia Jesu, instante supplicio crucis, deque verbis quibus visus est mortem deprecari : « Pater, si fieri potest, transeat a me calix iste ! »