Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/124

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de chercher à la dissiper, il l’augmenta par deux ou trois railleries piquantes. « Vous voyez, madame, me dit-il, qu’il y a de bonnes maisons ailleurs qu’en Angleterre ; mais peut-être préféreriez-vous à ce château, un chétif logement à Bath. »

« Heureuse, ma chère, la femme qui, dans toutes les circonstances de la vie, a pour appui, pour consolateur un compagnon d’une humeur agréable et facile… Mais à quoi bon arrêter ma pensée sur l’image du bonheur ? Ce n’est qu’aggraver mon infortune. M. Fitz-Patrick, loin de songer à égayer ma solitude, me prouva bientôt qu’en tous lieux, et en toute situation, j’aurois été malheureuse avec lui. C’étoit un homme hautain, impérieux, tel que vous n’en avez jamais vu ; car une femme n’en peut trouver le modèle que dans un père, un frère, ou un mari ; et votre père n’est point de ce caractère. L’insolent personnage s’étoit montré naguère à moi, il se montroit encore aux autres sous un jour bien différent. Bon Dieu, faut-il que les hommes portent constamment un masque dans le monde, et ne laissent voir leurs défauts que dans leur intérieur ? Là, ma chère, ils se dédommagent avec usure de la pénible contrainte qu’ils s’imposent en public. Plus mon mari avoit été vif et enjoué dans la société, plus il revenoit chez lui sombre et