pour nous, n’en ayant point rencontré de pareils dans le monde, nous n’avons pas voulu en présenter dans notre ouvrage. À dire vrai, nous ne croyons guère qu’un simple mortel soit jamais parvenu au dernier degré de la perfection, ni qu’il ait existé un monstre semblable à celui que peint Juvénal
Dont aucune vertu ne rachetoit les vices[1].
À quoi sert d’ailleurs d’introduire, dans un ouvrage d’imagination, des personnages d’une angélique vertu, ou d’une perversité diabolique ? Ces peintures exagérées, loin de produire un bon effet, ne causent au lecteur que du chagrin et de la honte. D’un côté il s’afflige, en contemplant des modèles si accomplis, qu’il désespère de pouvoir les égaler ; de l’autre il rougit de voir la nature à laquelle il participe, dégradée d’une manière si odieuse.
Dans le fait, il suffit qu’un caractère ait ce degré de bonté qui inspire aux esprits bien faits un sentiment d’estime et d’affection. Si l’on y remarque quelques-uns de ces légers défauts
Échappés par mégarde à l’humaine foiblesse[2],
ils excitent moins d’éloignement que de pitié.