Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/165

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Le goût, l’imagination qui trouvent tant d’attraits dans ces tableaux sublimes, ne dédaignent pas des beautés d’un ordre inférieur. Les bois, les rivières, les pelouses de Devon et de Dorset attirent les regards et ralentissent la marche du voyageur sensible ; mais il se hâte ensuite de traverser les sombres bruyères de Bagshot, et cette triste plaine qui s’étend à l’ouest de Stockbridge, où, dans l’espace de seize milles, nul objet n’excite son attention, à moins que, par pitié pour son ennui, les nuages n’offrent obligeamment à sa vue une agréable variété de formes fantastiques.

Ce n’est pas ainsi que voyagent le marchand avide de gain, le juge de paix occupé de procédure, le docteur constitué en dignité, le rustre vêtu de bure, et les nombreux enfants de l’opulence et de la sottise. Ils trottent d’un pas mesuré à travers les vertes prairies, ou les landes arides. Leur monture fait régulièrement quatre milles et demi par heure, l’animal et son maître portant l’un comme l’autre les yeux en avant, et contemplant les mêmes objets de la même façon. Ces honnêtes cavaliers s’extasient également à l’aspect des plus beaux monuments d’architecture, et de ces lourds édifices de briques qui décorent nos villes manufacturières, et dont la masse colossale n’atteste pas moins le mauvais goût que la richesse de leurs obscurs fondateurs.