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dame assez d’adresse pour en tirer autant, notez cela. »

L’hôtesse applaudit à la sagacité de son mari, et ainsi se termina leur court entretien.

Laissons là ces bonnes gens, et suivons le lord et ses belles compagnes. Leur marche fut si rapide, qu’ils firent quatre-vingt-dix milles en deux jours, et arrivèrent le lendemain au soir à Londres, sans aventure digne de remarque. Notre plume ne restera pas en arrière ; elle courra sur le papier avec la même vitesse. Un bon historien doit imiter le voyageur éclairé, qui proportionne son séjour dans chaque lieu aux beautés, aux agréments, aux curiosités qu’il y rencontre. À Eshur, à Stowe, à Wilton, à Estbury, dans le parc de Prior, les jours entiers ne lui suffisent pas pour admirer les prodiges de l’art, rivalisant avec les merveilles de la nature. Dans quelques-unes de ces retraites délicieuses, l’art emporte le prix ; dans d’autres, la nature le lui dispute. Le parc de Prior est le triomphe de celle-ci. Là elle déploie toute sa magnificence, tandis que l’art simple et modeste ne se montre, que pour relever ses charmes. Là elle a répandu les plus riches trésors qu’elle ait prodigués à l’univers ; là enfin, l’œil toujours enchanté ne se détache d’un site, que pour se fixer sur un autre avec plus de plaisir encore.