Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/294

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présentoit comme un miracle de la nature. Sa curiosité, déjà très-vive, fut encore augmentée par mistress Fitz-Patrick qui lui vanta autant la figure de Jones, qu’elle avoit d’abord déprécié sa naissance, son caractère, et sa fortune.

Quand lady Bellaston l’eut écoutée jusqu’au bout : « Madame, lui dit-elle avec gravité, c’est en effet une affaire très-importante. On ne sauroit trop applaudir à vos vues ; je serai charmée de contribuer à préserver de sa ruine une jeune personne d’un mérite aussi distingué, et pour laquelle j’ai tant d’estime.

— Milady ne pense-t-elle pas, reprit aussitôt mistress Fitz-Patrick, que ce qu’il y auroit de mieux à faire, ce seroit d’écrire sur-le-champ à mon oncle, et de l’informer du lieu où est ma cousine ? »

Lady Bellaston réfléchit un moment et répondit : « Non, madame, ce n’est pas mon avis. Je connois, par mistress Western, l’extrême brutalité de son frère, et je ne saurois consentir à remettre sous sa puissance une jeune fille qui a eu le bonheur de s’y soustraire. J’ai ouï dire qu’il s’étoit conduit comme un monstre avec sa propre femme. C’est un de ces misérables qui s’imaginent avoir le droit de nous traiter en esclaves ; et je croirai toujours servir la cause de mon sexe, en affranchissant de leur joug toute personne