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fus le plus formel et le plus absolu. M. Western en fut si irrité, qu’après avoir juré plusieurs fois qu’elle épouseroit Blifil de gré ou de force, il la quitta en l’accablant d’injures et de malédictions, ferma la porte sur elle et en mit la clef dans sa poche.

Tandis que Sophie n’avoit, pour charmer l’ennui de sa captivité, que cet adoucissement qu’on ne refuse pas au prisonnier d’état le plus étroitement gardé, c’est-à-dire du feu et de la lumière, l’écuyer s’amusoit à boire avec le ministre Supple et l’hôte des Colonnes d’Hercule. Ce dernier étoit, selon lui, un excellent compagnon, et pourroit l’instruire des nouvelles de la ville et de la situation des affaires publiques. « Il doit en savoir long, disoit-il, puisqu’il loge chez lui les chevaux d’une foule de gens de qualité. »

M. Western passa dans cette agréable société la soirée entière et une grande partie du jour suivant. Il ne survint pendant ce temps aucun incident digne de trouver place dans notre histoire. Sophie resta seule, livrée à ses tristes réflexions. Son père avoit fait serment qu’elle ne sortiroit pas vivante de sa chambre, à moins qu’elle ne consentît à épouser Blifil. Il tenoit sa porte soigneusement fermée. On n’entroit chez elle que pour lui porter à manger, et toujours en sa présence.