Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/385

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un dédain qui m’empêcha de revenir à la charge. Juste ciel ! il faut se résigner ; c’est Dieu qui conduit tout ; mais ma sœur est inexcusable d’avoir emporté ce secret dans la tombe.

— Je vous jure, monsieur, que ce n’étoit pas son dessein. Elle m’a souvent témoigné l’intention de vous le confier. Elle se félicitoit, il est vrai, de l’heureux succès de sa ruse ; et l’affection que vous aviez conçue naturellement pour son enfant lui permettoit, disoit-elle, de différer encore un pénible aveu. Ô monsieur ! si elle eût assez vécu pour voir ce pauvre jeune homme chassé de votre maison comme le dernier des misérables ! que dis-je ? si elle eût assez vécu pour apprendre que vous avez chargé vous-même un procureur de l’accuser en justice d’un meurtre dont il est innocent… Excusez ma franchise ; c’est une conduite inhumaine ; on vous a trompé ; jamais il ne mérita de vous un si dur traitement.

— Arrêtez, madame. Quiconque vous a fait un pareil rapport m’a calomnié.

— Daignez m’entendre, monsieur, je ne prétends vous adresser aucun reproche. L’homme qui est venu chez moi ne vous a inculpé en rien ; il m’a dit seulement, croyant parler à la femme de M. Fitz-Patrick, que si M. Jones avoit assassiné mon mari, tout l’argent nécessaire pour le poursuivre me seroit fourni par un digne