Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/396

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Il craignoit, dit-il, que ces gens ne se laissassent corrompre par M. Jones ou par ses amis. Il ajouta que le sang demandoit du sang, et que recéler un assassin, ou ne pas faire tous ses efforts pour le livrer à la justice, c’étoit se rendre complice de son crime. Il me dit encore qu’il savoit que vous seriez charmé de la punition du scélérat, quoique la bienséance ne vous permît pas d’y travailler ouvertement.

— Il vous dit cela ?

— Oui, monsieur ; et assurément pour tout autre que vous, je n’aurois pas été si loin.

— Qu’entendez-vous par là ?

— Croyez, monsieur, qu’à quelque prix que ce fût, je n’aurois pas voulu charger ma conscience du crime de subornation : mais il y a deux manières de rendre témoignage. Je dis donc aux matelots, que si la partie adverse leur faisoit des offres, ils les refusassent, et qu’ils étoient sûrs de ne rien perdre par leur franchise et leur honnêteté. J’ajoutai que, suivant le bruit qui couroit, M. Jones avoit été l’agresseur, et que si le fait étoit vrai, ils eussent à le déclarer, leur donnant à entendre qu’ils ne s’en trouveroient pas mal.

— Je vois qu’en effet vous avez été fort loin.

— Mais, monsieur, je n’engageai pas ces gens à trahir la vérité, et je n’avois d’autre intention que de vous obliger.