Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/415

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auparavant. Il le fit appeler sur-le-champ, et ordonna qu’on le laissât seul avec lui.

On ne sauroit se figurer une scène plus touchante que l’entrevue de l’oncle et du neveu ; car le lecteur se doute bien que mistress Waters, dans sa dernière visite à Jones, lui avoit découvert le secret de sa naissance. Nous ne chercherons pas à peindre les premiers transports de joie qui éclatèrent de part et d’autre ; il nous faudroit, pour y réussir, un talent qui nous manque. M. Allworthy releva Jones qui s’étoit précipité à ses pieds, et le serrant entre ses bras : « Ô mon enfant ! s’écria-t-il, combien je suis coupable envers vous ? que de torts j’ai à me reprocher ! Pourrai-je jamais réparer l’injustice de mes soupçons, et vous dédommager de tous les maux que je vous ai causés ?

— Ne suis-je pas déjà bien dédommagé ? dit Jones. Quand j’aurois souffert dix fois davantage, ne suis-je pas plus que payé de mes peines ? Ô mon cher oncle, tant de bonté me confond et m’accable. Mon cœur est si plein, qu’il ne peut contenir la joie qui l’inonde. Me retrouver en votre présence, jouir encore de votre affection, être accueilli avec cette tendresse par mon noble, par mon généreux bienfaiteur !…

— En vérité, mon enfant, reprit M. Allworthy, j’ai été bien cruel pour vous. » Il lui dévoila alors