Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

remercia de son obligeante visite. « Elle ne pouvoit être, lui dit-il, plus opportune. Je n’ai jamais été plus chagrin de ma vie.

— Je suis fâché, répondit Jones, d’apporter des nouvelles qui, loin d’adoucir votre affliction, ne serviront qu’à l’accroître. Il est pourtant nécessaire que vous en soyez instruit. Je vous dirai, M. Nightingale, que je viens vous trouver de la part d’une honnête famille que vous avez plongée dans le désespoir. »

Nightingale pâlit. Jones continua sans y faire attention, et lui peignit des plus vives couleurs la scène tragique qu’on a vue dans le chapitre précédent.

Nightingale ne l’interrompit pas une seule fois, malgré la violente émotion qui se manifesta à diverses reprises sur son visage. Quand Jones eut fini : « Mon ami, lui dit-il en soupirant, ce que vous venez de m’apprendre m’affecte de la manière la plus sensible. C’est un accident bien funeste que la publicité donnée à ma lettre par cette pauvre fille. Sans cela, sa réputation étoit sauvée, l’affaire demeuroit secrète, et n’auroit point eu de suites fâcheuses. Tous les jours il arrive ici de pareilles aventures. Si le mari, quand il n’est plus temps, vient à concevoir des soupçons, le plus sage parti qu’il ait à prendre c’est de les cacher à sa femme et au public.