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LA PLANÈTE MARS.

clxxxiv.Henry-H. Bates. — La Constitution chimique de l’atmosphère de Mars[1].

Le Mémoire de M. Campbell, publié plus haut, a été l’objet des remarques suivantes par ce chimiste, membre de la Société Astronomique du Pacifique :

J’ai été fortement frappé par les déclarations de M. Campbell sur le spectre de Mars. Ce Mémoire semble contredire entièrement les impressions admises jusqu’ici sur la présence de la vapeur d’eau dans l’atmosphère de cette planète ; M. Campbell lui-même paraît avoir travaillé en vertu d’une idée préconçue, mais opposée à ses résultats, ce qui rend son travail d’une très grande valeur. Il y a, à la fin de son article, une remarque que je voudrais mettre en évidence. Il considérait, avec beaucoup d’autres, que « les calottes polaires de Mars prouvaient l’existence de l’atmosphère et de la vapeur d’eau ». Ne serait-ce pas là aller trop loin, en l’absence de toute évidence positive et en présence de l’évidence négative opposée ?

La seule raison de croire en la présence de la vapeur d’eau sur Mars est l’augmentation et la diminution des calottes polaires blanches sous l’influence apparente du Soleil, en analogie avec celles de notre planète.

Mais pourquoi supposer de la neige ou de la glace ? Il paraît inadmissible, eu égard à la petitesse de Mars, à sa grande distance du Soleil, à son atmosphère raréfiée, qu’il puisse y avoir là une chaleur suffisante pour liquéfier la glace, même dans le cas où il y aurait une atmosphère de vapeur d’eau. La quantité de chaleur reçue est calculable et trouvée insuffisante. La température de Mars aux pôles ne peut pas être fort au-dessus du zéro absolu. La planète paraît refroidie jusqu’au centre et fendillée dans tous les sens, comme les cañons immenses, absurdement nommés canaux, nous le montrent. La planète se disloquerait en morceaux sous l’influence de la moindre force venant rompre l’équilibre, un peu dans le genre de sa voisine extérieure dont les débris ont formé les astéroïdes. Il n’y a pas de raison pour supposer que des calottes blanches impliquent nécessairement de la glace. Je considère qu’au lieu de protoxyde d’hydrogène, ces calottes sont plus vraisemblablement composées de dioxyde de carbone, ou, du moins, de quelque oxyde ou sel dont l’état solide, liquide ou gazeux soit en rapport avec les conditions actuelles de température sur Mars, calottes d’acide carbonique qui ressemblant à de la neige croîtraient et décroîtraient avec la très faible arrivée de chaleur sur Mars, de même que nous le constatons dans nos glaces polaires sous nos conditions de température beaucoup plus élevée. D’où les flots de dioxyde de carbone liquide qui

  1. Publications of the Astronomical Society of the Pacific, t. VI, 1898, p. 300-302.