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CORRESPONDANCE

mais à qui ils ont affaire. Avant-hier matin, 12, anniversaire de ma naissance, nous sommes revenus au Caire par une autre route, marchant tout le temps sous les palmiers ou au bord du Nil et allant au petit pas pour faire durer le plaisir ; aussi avons-nous mis sept heures pour une route qui en demande quatre.

Je t’ai parlé de verdure. Cela peut te sembler drôle. Mais il y a en Égypte deux choses, l’Égypte proprement dite, la vallée, tout ce qui reçoit l’inondation, qui est plus vert que la Normandie, et immédiatement à côté le sable aride, le désert, de sorte que ces deux couleurs tranchent brutalement côte à côte, dans la même vue, comme du haut des pyramides, par exemple. Vous voyez des champs, des prairies, des mosquées, et le désert, cette grande polissonne d’étendue qui est violette au soleil levant, grise en plein midi, et rose le soir. Ah ! tout cela est bien farce.


242. À SON FRÈRE.
Le Caire, 15 décembre 1849.

Tu dois commencer à trouver que je suis une fière canaille de ne vous avoir pas donné plus tôt de mes nouvelles, mon cher Achille ; mais c’est tout au plus si j’ai le temps, à chaque courrier, de griffonner à la hâte quelques lignes pour notre pauvre mère. Nous rentrons le soir passablement échignés et, dès que nos notes sont prises, nous tapons de l’œil. Voilà deux jours que nous sommes revenus des pyramides. De tout ce que j’ai vu. jusqu’à présent, c’est à coup sûr ce qu’il y a de