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DE GUSTAVE FLAUBERT.

et un quatrième. 3o  Pourquoi faire une exception qui m’est défavorable ? puisque, du moment que l’on a un nom en littérature, il est d’usage de vendre chat en poche.

Si toutes ces considérations étaient levées, je passerais sur la première de toutes, qui est une répugnance, une horripilation extrême à me laisser juger par M. Lévy. Il doit acheter mon nom et rien que cela. Ah ! que j’ai eu raison de confier mon affaire à un tiers ! Si j’étais là-bas, j’aurais embrouillé ou, pour mieux dire, rompu les choses par ma violence intempestive. Quant à la question d’immoralité qui revient (est-ce une plaisanterie du président ou une objection de Michel ?), je me targue : 1o  du jugement qui me déclare un homme moral ; et 2o  de l’opinion des bourgeois qui me déclarent obscène — ce qui fait qu’à ce point de vue-là j’ai une valeur double. Bref, ça commence à m’em… et je vous enverrai ma réponse définitive dès que j’aurai eu ton avis et celui de Monseigneur. J’ai lu, grâce à toi, quatorze féeries ; jamais plus lourd pensum ne m’a pesé ! Nom d’un nom ! est-ce bête ! Mais ce n’est pas une féerie que je veux faire[1]. Non ! non ! je rêvasse une pièce passionnée où le fantastique soit au bout ; il faut sortir des vieux cadres et des vieilles rengaines et commencer par mettre dehors la lâche venette dont sont imbibés tous ceux qui font ou veulent faire du théâtre. Le domaine de la fantaisie est assez large pour qu’on y trouve une place propre. Voilà tout ce que je veux dire.


  1. Voir Le Château des cœurs, dans Théâtre de Flaubert.