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CORRESPONDANCE

un ours empaillé. La semaine dernière, cependant, j’ai été à Rouen, dans les salons de la préfecture ! oui, pour signer le contrat de mariage de la fille du préfet. Mes compatriotes ont des binettes gigantesques et je me suis très amusé.

Pourquoi ne sent-on pas le comique, quand on est jeune ?

J’ai envoyé votre lettre aux Goncourt, tout de suite, bien entendu. Je vous assure (derechef) qu’ils sont très gentils, et il y a tant de pignoufs !

C’est un produit du XIXe siècle que « pignouf » ; nous arrivons même à « pignouflard », qui est son fils, et à « pignouflarde », qui est sa bru.

Connaissez-vous des détails sur l’incident Sainte-Beuve ? Moi, pas un. Est-ce qu’il lâche décidément l’Empire ? Il a donc cédé à « celui » de la colère ? — Pardon !


1012. À LA PRINCESSE MATHILDE.
Jeudi [janvier 1869].

Votre lettre d’hier m’a affligé, Princesse, et j’y aurais répondu tout de suite sans le mariage de Mlle Leroy, la fille du Préfet. J’ai fait une grande débauche : j’ai été à Rouen, en soirée !

Puisque vous avez du chagrin, j’en ai. Mais permettez-moi de vous dire qu’il me semble que vous vous en exagérez un peu la cause. Ce n’est pas le drapeau qu’il faut regarder, mais ce qu’il y a dessous ; l’on écrit importe peu ; le principal est ce que l’on écrit.

Je ne défends nullement le journal Le Temps,